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Législatives 2024 : la contre-performance du Rassemblement national expliquée par les chiffres

Le « premier parti de France » n’aura pas de majorité à l’Assemblée nationale. Malgré de bons résultats au premier tour des législatives anticipées, le Rassemblement national (RN) et ses alliés ont été déçus, dimanche 7 juillet, de n’obtenir que 143 sièges, bien loin des 289 nécessaires pour obtenir la majorité absolue. Comment expliquer cette désillusion ?

Jordan Bardella a dénoncé « l’alliance du déshonneur » et un second tour faussé par des « arrangements électoraux ». Un résultat marqué par « la tambouille politicienne » et « l’alliance de la honte », a abondé Eric Ciotti. Mais l’analyse détaillée des résultats du second tour dessine une réalité plus contrastée.
Si le RN a indubitablement été pénalisé par le front républicain, accentué par le fonctionnement du scrutin à deux tours, il a aussi souffert des limites de ses propres réserves de voix. Election après élection, le parti de Jordan Bardella étend son assiette d’électeurs, mais demeure très clivant.
Le système à deux tours des législatives favorise naturellement les partis de consensus, au détriment des partis radicaux. En effet, les électeurs dont le candidat a été éliminé – ou qui s’est désisté – à l’issue du premier tour se reportent sur celui ou celle qui paraît le moins éloigné de leurs idées. Depuis 2017, le groupe pivot à l’Assemblée, au centre, est ainsi celui qui a converti le plus de candidats en députés élus, quand le RN affiche au contraire le plus faible taux d’élection. Cela ne l’empêche toutefois pas de progresser : il passe de 1 % des sièges en 2017 à 25 % en 2024.

Ce graphique représente le nombre de candidats présents au second tour (cela comprend les élus au premier tour) par nuance ainsi que leur nombre final de sièges.

Source :
ministère de l’intérieur, réétiquetage Le Monde

Cela a été la surprise de ce second tour. Alors que l’alliance surprise d’Eric Ciotti avec le RN laissait augurer un affaiblissement de la digue entre l’arc républicain historique et le parti d’extrême droite, il n’en a finalement rien été. Dans la quasi-totalité des configurations, grâce aux désistements, le parti de Jordan Bardella a perdu les face-à-face avec des candidats issus du front républicain.
Les reports de voix ont été particulièrement importants chez les électeurs de gauche, expliquant en partie la performance inattendue d’Ensemble. Les votants de droite se sont montrés moins enclins à soutenir la gauche au second tour, comme en attestent les performances plus importantes du RN face à des candidats du Nouveau front populaire (NFP).

Ce graphique représente le pourcentage total de victoire du RN dans les
différentes configurations de second tour.

Source :
ministère de l’intérieur, réétiquetage Le Monde

Enfin, malgré un score historique le 30 juin, le parti emmené par Jordan Bardella peine toujours autant à convaincre les électeurs d’autres candidats de se rabattre sur lui au second tour. Alors que les candidats Les Républicains (LR) et Ensemble ont bénéficié à plein des reports de voix des candidats battus, le RN a attiré en moyenne quatre fois moins de reports au second tour.

Ce graphique représente la médiane des différences de voix entre le premier
et le second tour pour chacun des candidats.

Source :
ministère de l’intérieur, réétiquetage Le Monde

Manon Romain et William Audureau
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